Inés Blumencweig. Structures sensibles

Du 13 octobre 2022 au 7 janvier 2023, la Maison de l’Amérique latine accueille l’artiste argentine Inés Blumencweig  pour une exposition unique présentant une sélection de 11 œuvres de l’artiste.

Fruit d’une collaboration avec l’Institute for Studies on Latin American Art (ISLAA), l’exposition met en lumière cette artiste argentine méconnue du grand public et du monde de l’art, dont l’œuvre est pourtant significative des avant-gardes italiennes des années 1960-70. 

 

Mais qui est Inés Blumencweig ? 

 

Née à Buenos Aires en 1930, elle est formée dans les années 50 par les peintres surréalistes argentins comme Nélida Demichelis ou Jaume Battle Planas avec lesquels elle exposera dans plusieurs galeries de la capitale argentine. En 1960, elle se marie avec Mario Pucciarelli (chef de file du mouvement informaliste argentin), avec qui elle quitte l’Amérique latine pour s’installer à Rome en 1961. Durant les années 60, elle organise quelques expositions personnelles tout en travaillant comme journaliste d’art pour une agence de presse italienne. Après quelques années en France, passées entre Nice et Paris dans les années 80, elle rejoint Mario Pucciarelli à Rome où elle vit encore aujourd’hui.

Au cours d’une conversation avec Jordi Ballart Junyer, commissaire de l’exposition et directeur de projet à l’ISLAA, j’apprends avec stupéfaction la manière dont le travail d’Inés Blumencweig a été redécouvert. Lorsque les chercheurs de l’ISLAA entreprennent des études sur Mario Pucciarelli, connu pour ses grandes toiles abstraites qui rappellent le travail d’Antoni Tapiès (un des principaux représentants de l’informalisme espagnol), ils ne s’attendent pas à découvrir le travail de sa femme Inés restée dans l’ombre.

Comme beaucoup de femmes artistes de son époque, elle s’est effacée derrière son époux, artiste plus connu et dont l’activité artistique permettait au jeune couple de vivre. Néanmoins, la jeune femme n’a jamais cessé de créer dans leur atelier commun, et aujourd’hui 42 ans après sa dernière exposition personnelle, son travail est mis en lumière montrant sa contribution artistique à l’art de son temps. 

 

Une artiste de son temps 

 

D’abord influencée par le surréalisme argentin, Inés Blumencweig change radicalement de cap après un voyage aux Etats-Unis en 1960 aux côtés de Mario Pucciarelli, et restera fortement marquée par l’expressionnisme abstrait. A son arrivée à Rome, elle développe un nouveau type d’œuvres mêlant les matériaux industriels à la toile. Elle leur donne le nom de Structures Sensibles, appellation poétique qui rappelle l’importance de la tridimensionnalité dans son travail.

Struttura Nero-Rame, 1963, toile et métal, 90 x 90 cm

Pour ses premières œuvres, elle réalise des lacérations dans la toile à l’aide de lames de métal qu’elle insère ensuite à l’œuvre. Au même moment, né l’Arte Povera mouvement italien d’avant-garde aux dimensions sociales et politiques, qui privilégie le geste créateur, le processus au détriment de l’objet fini. Influencée par le spatialisme, né quelques années plus tôt, Inés Blumencweig rencontre Lucio Fontana, célèbre pour ses lacérations de toiles. En cela le travail d’Inés est intéressant, car avec ses toiles lacérées elle se place dans la continuité de ces mouvements artistiques d’avant-garde tout en les réinterprétant de manière originale. Les toiles portent en elle une touche plus douce et sereine en comparaison de la violence qui ressort des lacérations de Fontana. 

 

 

Dans une évolution constante, la toile commence à disparaître au profit de ces lames de métal qui envahissent l’espace de l’œuvre. Et puis à partir des années 70, les lames de métal sont remplacées par des rubans de nylon tendus sur les toiles. Des jeux d’ombres et de lumière se créent, de même que se forment dans l’oeil du spectateur des effets visuels dus à la contorsion du ruban de nylon, rapprochant son œuvre du mouvement cinétique italien, Arte programmata. 

L’exposition nous fait donc découvrir le travail de cette artiste argentine qui a traversé les siècles, et dont l’œuvre se trouve à la croisée des différents mouvements artistiques des années 60-70.

 

Une exposition à découvrir au cœur de Paris, dans le magnifique écrin de la Maison de l’Amérique latine, ancien hôtel particulier du XVIIe siècle. 

 

Entrée libre. Du lundi au vendredi de 10h à 20h, le samedi de 14h à 18h.

 

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