Du 7 novembre 2019 au 23 février 2020 au Musée des Arts Décoratifs
Thème particulier, sujet à part, cet accessoire a été très souvent oublié dans l’histoire de la mode. De la même manière que l’on pourrait se demander, pourquoi et comment l’homme marche, pourquoi et pour qui se chausse-t-il ? Cette exposition retrace son histoire dans une vision internationale et transversale, d’un élément commun à toutes civilisations et en tout lieux.
Être dans ses petits souliers
Le point de départ de cette exposition fut un soulier de Marie-Antoinette, conservé au Musée des Arts Décoratifs depuis 1909. Sa petitesse et son étroitesse ont intrigué le commissaire d’exposition, Denis Bruna, sur la possibilité en Occident de l’existence d’une pratique de modifications corporelles visant les pieds, plus connue en Chine. Fruit d’une longue enquête basée sur des sources iconographiques, textuelles et matérielles, cette exposition présente selon un tout nouveau point de vue la chaussure. Elle tente alors de répondre à la question suivante : comment femmes, hommes et enfants marchaient-ils selon les époques, cultures, groupes sociaux ?
La chaussure est avant tout un élément qui protège notre pied des aspérités du sol en créant une limite entre la terre et la plante du pied. Apparue dès la Préhistoire, cette fonction primaire fut rapidement détournée pour devenir objet de parure des élites, un moyen de se distinguer comme dans le vêtement. Par conséquent, les souliers sont le reflet de la place de son porteur dans la société. En fin de parcours, on peut voir comment la chaussure dans l’art contemporain, peut radicalement être occultée de sa fonction de marche, en devenant un objet à part entière, quasi sculpture. Elle devient alors un objet inutile et absurde.
Prendre son pied
Si l’on peut reprocher à l’exposition de surcharger la première partie du parcours de visite, puis ensuite de ne présenter que de rares pièces, il faut toutefois reconnaître que le choix des œuvres est toujours judicieux et permet d’appréhender de nombreux aspects de la chaussure. La chaussure de sport, la chaussure militaire, la chaussure de plage, celle des contes et des mythes, le soulier enfantin, la chaussure fétichiste… Les pièces de créateurs comme Roger Vivier ou François Pinet, côtoient d’autres plus humbles comme les sabots de paysans, tous les deux ayant un statut équivalent de pièce de mode. Tout, tout, tout, vous saurez tout sur la chaussure !
Trouver chaussure à son pied
Au-delà de l’évolution des formes, c’est une histoire du rapport entre le corps et le vêtement qui est mise en lumière. Cette thématique avait déjà était exploitée dans une exposition précédente « Tenue correcte exigée ! » en 2017. Ou comment divers éléments viennent structurer le corps, le conformer, selon des canons définis par des sociétés données. Selon notre avis, la salle traitant du culte du petit pied qui illustre le mieux ce propos. Elle remet en question notre vision occidentale attribuant l’apanage de la déformation volontaire des pieds à la culture chinoise. Un parallèle des plus intéressant est réalisé de manière à placer en miroir des chaussures européennes du XVIIIe siècle avec celles des femmes aux pieds de lotus (Attention âme sensible s’abstenir toutefois).
Bien que la chaussure ait la part belle, elle reste toutefois accompagnée de documents comme des photographies, des films, des images d’archives, des publicités indiquant la réception (plus ou moins bonne) de certaines chaussures. Aussi, une partie, d’aspect plus technique, est dédiée au travail du cordonnier, du bottier ou chausseur. Elle permet de se familiariser avec les subtilités du métier lié à la chaussure, mais aussi à la variété du vocabulaire employé. Le cordonnier à l’origine, étant le véritable fabricant de chaussures à l’origine, il perd petit à petit son statut lors des progrès techniques accompagnant l’industrialisation. Désormais, il a aujourd’hui comme rôle la stricte réparation de nos chaussures. Le bottier, lui, prend progressivement un statut de créateur et d’innovateur à l’image du grand Salvatore Ferragamo,. Il a déposé de nombreux brevets de ses créations et c’est son iconique chaussure à plateforme monumentale accueille le visiteur.
Marcher à côté de ses pompes
Notre GRAND coup de cœur dans l’exposition (et aussi ce qui fait toute la différence avec une simple exposition portant sur des accessoires de mode) c’est la possibilité, au milieu de parcours, d’essayer des œuvres présentées en vitrine. Elles sont recréées sous la forme de modèles neutres en cuir beige, reliées à des cordelettes. Pendant quelques pas, on peut s’essayer à devenir une oiran marchant sur les pavés de Kyoto, une noble Vénitienne hissée au dessus des eaux ou un chevalier courtois de la cour de France. En plus de satisfaire notre curiosité face à la démesure de certaines chaussures, il y a une volonté de faire participer activement et physiquement le visiteur. Néanmoins vous êtes prévenus, le musée décline toute responsabilité en cas de chute !
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