Degas à l’Opéra – Exposition au musée d’Orsay
Du 24 septembre au 19 janvier 2020
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Depuis ses plus jeunes années, Degas est intéressé par l’étude du corps en tension. Ses études de chefs d’oeuvre du Louvre, présentées au tout début de l’exposition, en sont la preuve : Degas retranscrit en quelques coups de crayons la vivacité de la musculature de l’Esclave mourant, en quelques coups de pinceaux l’effort désespéré de la Crucifixion de Mantegna. Un grand maître de la peinture vu par les yeux d’un autre, étonnant prisme déformant que celui-ci. Si ces copies sont d’émouvants témoignages des heures de travail au musée du Louvre auxquelles devait s’astreindre tout jeune artiste, elles permettent également de comprendre combien Degas trouve plus tard dans l’étude des danseuses de l’Opéra un matériau privilégié de sa recherche d’observation anatomique.
Musique ! Voici que l’on pénètre à présent dans l’univers magique, fastueux et illusoire de l’Opéra. Et pour accueillir le visiteur, est exposée l’immense maquette de l’Opéra Garnier ; en miniature, on y retrouve avec précision les moindres détails des stucs, décors plafonnants, lustres… et son célèbre escalier bien sûr. Vitrine du Second Empire, l’Opéra Garnier, achevé en 1875, vient remplacer l’Opéra de la rue Le Peletier au sortir duquel Napoléon avait subi un attentat en 1858. Victime d’un incendie en 1873, cet Opéra provisoire, longtemps fréquenté par Degas, était son préféré, pour l’ambiance feutrée et resserrée de la salle, la parfaite qualité de l’acoustique. Plusieurs maquettes de décors, des esquisses de costumes, et même des enregistrements de cantatrices et de chanteurs que put entendre Degas reconstituent cette ambiance surannée et disparue du grand Opéra du XIXe siècle.
Sensible à la musique, Degas l’est dès son plus jeune âge grâce à sa famille. Héritier de la banque familiale, son père tient en effet tous les lundis, dans les années 1860, un salon où la musique ancienne joue un rôle capital. A cette occasion, Degas réalise ses premiers portraits de musiciens, un thème qui l’intéresse durant toute sa vie.
Il commence son entrée dans le monde de l’Opéra par un portrait : celui d’Eugénie Fiocre, célèbre danseuse, dans le ballet « La Source », en 1867. Fidèle aux costumes de scène, l’artiste dépeint la jeune femme mélancolique, pensive ; une oeuvre étonnante qui n’est pas sans rappeler le japonisme, très à la mode alors. Quoi qu’il en soit, ce portrait inaugure l’indéfectible lien entre Degas et le monde de la scène.
De plus, en 1870, Degas reçoit la commande du portrait de Désiré Dihau, bassonniste à l’Opéra ; ce portrait obtient un grand succès et lance une formule que le peintre réutilise de façon récurrente : le musicien, bassonniste ou trompettiste, occupe le premier plan du tableau, tandis qu’à l’arrière-plan, en hauteur et surexposée, apparaît une ballerine émergeant des lumières crues de la scène ; parfois coupée par le bord du cadre, elle donne lieu à un cadrage original et déroutant.
« Vous voulez me décorer, c’est donc que vous voulez me faire plaisir, eh bien ! donnez-moi mes libres entrées à l’Opéra, ma vie durant. », Degas
L’air est empesé par l’effort de l’exercice… De multiples et légères petites ballerines occupent l’espace de la salle de répétition de leurs tutus amples et vaporeux, flocons blancs dans l’atmosphère. L’une esquisse un entrechat, l’autre s’étire à la barre, une autre encore, alanguie sur un tabouret, étire ses muscles endoloris. Au premier plan, sur une chaise, gisent un éventail rouge et un mouchoir. La lumière vient accrocher le satin rose d’une pointe, l’éclat immaculé du tulle, le velouté d’un dos, le chatoiement d’un ruban coloré. Le tout sous le regard attentif, paternel et sévère, du maître de danse, la canne à la main. Jules Perrot, ancien danseur devenu maître de ballet, est resté emblématique de ces célèbres compositions où Degas se plaît à répéter, avec de multiples variantes, l’ambiance si particulière d’une classe de danse.
Cependant le thème de l’Opéra est bien plus varié que la salle d’exercice devenue si célèbre ; dans cet univers vespéral, Degas se plaît aussi à dépeindre les élégantes silhouettes en hauts de forme, qu’il caricature dans des séries de monotypes ; leur haute stature, l’élégance de leur tenue, se prête bien au thème de la vie moderne que le peintre apprécie tant. Ou encore, l’éclairage brutal de la scène donne lieu à s’exercer à des jeux de lumière abruptes et très impactants visuellement, qu’ils soient retranscrits au pastel, à la craie ou dans un camaïeu de peinture à l’huile.
Thème moderne et prisé de la vie mondaine, l’Opéra est aussi pour Degas une sorte de laboratoire où l’artiste renouvelle et innove dans le choix des techniques employées. Peut-être inspiré par les accessoires de mode des dames élégantes qu’il observe dans les loges, il a l’idée d’une sorte de mise en abyme en peignant des éventails peints. La forme demi-circulaire de la pièce de soie lui fait expérimenter un format inédit, qu’il n’hésite pas à traiter avec audace, en coupant des personnages sur les bords par exemple. Mais l’étude des rats de l’Opéra est aussi pour lui une occasion rêvée de s’initier à la sculpture ; les petits modèles en cire de danseuses à l’exercice, retrouvés dans son atelier et fondus en bronze après sa mort, en sont la preuve. Bien que ces statuettes, surtout destinées à préparer des compositions picturales, soient restées cachées du grand public, Degas sculpteur fait scandale en présentant à l’exposition impressionniste de 1881 la fameuse Petite danseuse de quatorze ans ; la critique est horrifiée — et stupéfiée — de cette représentation hyper-réaliste où la chair est imitée par de la cire rosée, habillée d’un vrai costume de danseuse et coiffée de cheveux véritables. Ras de marée pour l’histoire de l’art que cette oeuvre qui présente désormais la réalité de l’Opéra sans aucune idéalisation ni concession.
Degas sculpteur, mais aussi Degas dessinateur, et l’un ne va pas sans l’autre. Afin de préparer ses tableaux à l’huile, et de sans cesse affiner son coup de crayon, l’artiste multiplie les études dans ses carnets. A noter le raffinement de ses études sur papier de couleurs, aptes à faire ressortir les jeux d’ombre et de lumière, par l’emploi de fusain et de craie blanche : de la sculpture immatérielle et poétique de lumière sur une surface plane, en somme.
Jusqu’à la fin de sa vie, le thème de l’Opéra, des danseuses, ne cesse de hanter Degas, pourtant sans jamais épuiser son imagination. Ainsi à partir de 1879 Degas innove par l’emploi d’un format de toile singulier, appelé « tableau en long », consistant en un double carré. Loin de conduire à une frise monotone, ces dimensions lui permettent de créer une composition en forte diagonale, où les personnages sont parfois coupés pour mieux suggérer que la scène est un subtil instantané et que l’espace se poursuit bien au-delà du cadre. Et même lorsque la vieillesse lui rend difficile l’exécution picturale, Degas n’abandonne pas son cher Opéra ; au contraire, par son art brillant de ses derniers feux, il le magnifie au pastel, dans des « orgies de couleur », harmonieuses et insaisissables.
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Informations pratiques
Degas à l’Opéra Exposition du 24 septembre au 19 janvier 2020 Musée d’Orsay 1 Rue de la Légion d’Honneur, 75007 Paris, France Métro : ligne 12, station Solférino Fermé le lundi ; du mardi au dimanche de 9h30 à 18h ; jusqu’à 21h45 le jeudi Plein tarif 14€, tarif réduit 11€ |
J’ai également hâte de découvrir cette très belle exposition.