Sally Mann et Marc Pataut au Jeu de Paume

Sally Mann et Marc Pataut au Jeu de Paume

Marc Pataut, De proche en proche

Marc Pataut, né à Paris en 1952, est un photographe engagé qui commence à pratiquer la photographie en 1978. Il travaille, pour une période courte, pour l’agence Viva, agence de presse créée en 1972 par de jeunes photographes. En réaction aux photographies de presse généralement trop simplistes et dramatisées, ils voulurent réaliser des reportages de fond sur des sujets quotidiens. Dans ce cadre, le photographe essaie de raconter une histoire à la fois individuelle et collective.

L’exposition actuellement présentée au Jeu de Paume, est constituée d’une

sélection de ses essais photographiques réalisés de 1981 à aujourd’hui. Il s’agit d’une proposition artistique qui présente des œuvres dans la relation politique qu’elles développent au temps, à la société, à l’espace et au territoire.
Son travail, invite les visiteurs à une véritable réflexion sociale et politique. Le choix de différents formats vise à créer un lien avec le corps du visiteur.

Les portraits de plusieurs époques sont installés à diverses hauteurs, créant comme des distances et des rapprochements. Avec la série Apartheid qui réalise de 1986 à 1989, l’artiste essaie de se mettre à la place des personnes des violences inédites durant la ségrégation raciale au profit de la population blanche en Afrique du Sud.
Dans la série de photographies Du paysage à la parole de 1998, un panorama sert de fond à une série d’images, tracts, traces de son expérience dans une cité du bassin minier du Pas-de-Calais. Derrière chacune, des paroles revendicatives de personnes rencontrées sont inscrites. Les visiteurs sont incités à prendre et à diffuser ces images, témoignages de ces morceaux de vie.
Des manifestations sociales contre le chômage et la précarité, des photographies dans des institutions hospitalières, notamment en psychiatrie, des difficultés d’accès aux soins pour les personnes sans-abri ainsi que des autoportraits sont évoquées lors de ses projets.

« C’est se cultiver, mais aussi faire en sorte que les autres se cultivent, c’est produire de l’invention, c’est pour moi l’idéal de l’institution. C’est à la fois travailler pour soi et pour les autres, une interface entre moi et le monde. Cela pourrait être ma définition de la photographie »Marc Pataut

Sally Mann, Mille et un passages

Une rétrospective de l’œuvre de Sally Mann, photographe américaine, née à Lexington de Virginie aux États-Unis en 1951, est présentée en même temps au sein du Jeu de Paume. Nommée meilleure photographe américaine par la revue Time en 2001, c’est une opportunité pour le public français d’approcher son œuvre originale et partager ses réflexions sur l’enfance, les paysages, le passé esclavagiste du Sud-américain, sur le temps qui passe et le corps qui se dégrade. Elle photographie des évènements quotidiens avec une intensité dramatique ce qui donne à ses photographies lune esthétique unique et difficile à imiter.


Exposition articulée autour de cinq séries

dont la première est intitulée Famille, elle prend des photographies de ses enfants Emmet, Jessie et Virginia, nés respectivement en 1979, 1981 et 1985. Ces tirages ont fait de scandale en 1992 lors de leur publication. On a reproché à Sally Mann d’érotiser le corps de ses enfants, de les utiliser, on l’a accusée de pornographie. Selon elle « la plupart portent sur des choses ordinaires que toute mère a eu sous les yeux ». En photographiant ses enfants dans leur lieu de vacances, elle évoque les ambiguïtés de l’enfance sans l’idéaliser. Dans la plupart il s’agit des photographies de mise en scène. La vie domestique devient alors la source des thèmes forts.
Après ces polémiques, Sally Mann a arrêté quelque temps de photographier ses enfants pour se consacrer au cadre naturel, aux paysages de sa Virginie natale mais aussi de Géorgie, Louisiane et Mississipi. Elevée dans une famille plutôt libérale, influencée par le roman Absalon de William Faulkner ainsi que par l’assassinat d’Emmett Till, en 1955, par deux blancs, elle commence à traduire sa réflexion sur l’histoire de sa terre natale en des photographies sombres et sublimes. Une femme noire, Virginia, qu’elle surnommait Gee-Gee, s’est occupée d’elle toute son enfance ce qui l’a fait aussi sentir proche aux Afro-américains.


En utilisant le procédé ancien du collodion humide elle joue avec les nombreuses imperfections qui sont créés à cause de la poussière qui se colle sur l’émulsion, celle-ci coule, les bords sont irréguliers et c’est imprévisible. Elle aime travailler avec du matériel imparfait, bricolé, raconte-t-elle.


Dans la dernière section de l’exposition, Ce qui reste, elle entre dans une période de réflexion intense sur la fragilité de la vie, le passage du temps et les relations familiales. Les défauts du collodion évoquent le corps qui se dégrade ce qui aide la photographe à exprimer sa douleur durant la maladie de son mari.

Jeu de Paume,

1 place de la Concorde, Paris 8e
jusqu’au 22 septembre 2019
dimanche 11h-20h
tarifs : 10 € / 7,50 €
Sally Mann, mille et un passages, Editions Xavier Barral, 332p., 55

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